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13 novembre 2020 5 13 /11 /novembre /2020 14:10

Ce matin, vendredi 13, anniversaire.
Sa peau fine. Sa bouche et ses pommettes rosies. Ses mains glacées.
Sa voix qui disparaît. Son fantôme muet qui ne me quitte jamais.

Elle est là. Elle me manque. Elle n’est pas la seule.
D’autres l’accompagnent. Leurs souvenirs murmurent une triste mélodie chaude et salée qui pourrait me plomber.
Debout. Ce n’est pas le sujet.

Une autre année. Une éternité.
Nous allions la célébrer, souffler avec elle ses bougies.
Nous dinions. Les téléphones ont commencé à vibrer. La fin avait sonné.
Dans la lumière bleue des écrans, nos visages se figeaient.
Nous cherchions des preuves de nos ami·es en vie.
Si le hasard n’avait pas frappé. S’ils et elles étaient en sécurité.
L’horreur avait surgi.
L’effroi nous vidait de toute envie.
Nous essayions de ne pas couler dans la nuit.

Cinq ans plus tard, dans cette deuxième vague contaminée, je ne rêve que de les retrouver et danser.
Les frôler, les embrasser dans une foule de sueur. Y Plonger de tout mon cœur.
Sentir la musique dans ma cage thoracique, être bousculée par leurs corps.
Que cette fête ne finisse jamais. Que nous n’ayons pas peur.
Être réchauffée. Être rassasiée de leur présence.
Lire sur leurs lèvres. Sourire à pleines dents.

Il faudra du temps.

Quand le moment sera venu, les barrières levées, nous nous retrouverons.
Nos gestes n’attendront plus aucun autorisation.
Nous ne nous cacherons plus derrière des masques et des postures.
Nous nous aimerons sans distance.

Effronté·es, maladroit·es, sans pudeur.

Nous nous aimerons de toute évidence.

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28 octobre 2020 3 28 /10 /octobre /2020 11:30

Pour accueillir.
Protéger.
Réchauffer.
Materner.
Composer.
S’allonger.
Jouer.
Se cacher.
Rêver.
Cajoler.
Chérir.
Colorer.
Aimer.
Adoucir.
Voyager.
Pour bercer.

Pour Charles.

Couverture de berceau - Sonia Delaunay, 1911

Couverture de berceau - Sonia Delaunay, 1911

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6 avril 2020 1 06 /04 /avril /2020 16:26

Aujourd’hui, il pleut.

Nous étions passés à travers, jusqu’ici.

Rien ne nous empêchait, pas même les petits degrés, de prendre l’air dans cette cour.
Sortie enfermés, nous sommes pourtant des privilégiés. 

L’heure de la promenade jamais manquée. Prisonniers chez nous, nous n’avons jamais autant observé le cerisier en fleurs, le va-et-vient des mésanges et compté les rares traces d’avions dans le ciel.

 

Aujourd’hui, il pleut.
Et cette pluie qui frappe contre les carreaux me rappelle que rien ne me manque plus que l’eau et celui qui me donna le goût d’y plonger, qui m’apprît à nager sur le dos, à ne pas boire la tasse, à oser pour gagner.

 

Aujourd’hui, je voudrais être demain, revoir le bassin olympique de cette piscine municipale où nous allions ensemble. Je veux faire le crocodile sur son dos. Je veux le voir sortir du sauna dans son peignoir bleu et sauter du grand plongeoir pour ses beaux yeux. 
Vœu pieux. Nous sommes trop vieux.

 

Aujourd’hui, nous sommes en novembre 1991. Freddy Mercury vient de mourir. Dans la voiture, sur le chemin du retour, la radio passe « We are the champions ». Première compétition en petit bassin et première victoire pour ma part, celle de finir la course dans le même couloir de nage que celui dans lequel j’étais inscrite et dans lequel j'ai sauté (techniquement ce serait mentir que d’appeler cela un plongeon). Je ne sais plus si ce jour-là je portais ce maillot de bain argenté avec des bandes jaunes fluo que j’adorais. Mais je me souviens que pour m’encourager, cette année, je reçus pour Noël, offerte par ma mère, la panoplie complète de l’apprentie nageuse : sortie de bain vert émeraude, claquettes Arena à semelles à picots massant, bonnet en silicone et lunettes suédoises. J’étais fière. En faisant cela, elle m’encourageait, non à devenir une championne, mais à avoir confiance en moi. Dans les gradins, la famille était réunie. Je ne me trompe pas en disant que ce fut le plus beau moment de ma courte carrière de nageuse. 

 

Mes motivations n’étaient pas tant de décrocher des records, de gagner des médailles, de monter sur le podium, même si j'adorais nager, mais d’user autant que faire se peut mon maillot de bain. Pour une unique  raison, pouvoir porter à l’entraînement deux maillots usés superposés. Cela représentait pour moi le Graal. Seules les « grandes » le faisaient. J’adorais cette dégaine, signe de reconnaissance ultime de notre valeur et ardeur dans le bassin, de notre vitesse de croisière. Le tissu des maillots trempé dans l’eau chloré des heures durant plusieurs fois par semaine, perdait de sa superbe, de son opacité et de son élasticité. La parade, en mettre deux ensemble et ainsi les user jusqu’à la corde et sauver les plus beaux pour la compétition.

 

Tout un art. J’épiais après chaque entraînement les premiers signes d’épuisement qui se traduisaient par l’apparition de petits points jaunes râpeux sur le tissu, comme une maladie contagieuse. C’était une obsession. Le chrono m’importait peu. J’épiais à la lumière du jour la transparence du lycra. Je devais paraître ridicule, superficielle. J’avais le sentiment que j’appartiendrai au groupe qu’à partir de ce moment où je pourrais afficher un double maillot. Mais pour cela, il fallait le mériter. Montrer les preuves de l’endurance, de la persévérance. Précipiter le processus était le meilleur moyen de se retrouver seule au vestiaire, sans coéquipière.

 

Si je ne fréquente plus les piscines qu’en amatrice à la pause déjeuner, je n’ai jamais plus re-croisé de tel accoutrement, c’est ainsi que le qualifiaient les parents.
À l'heure du recyclage, de l'upcycling, quand nous serons à nouveau autorisés à barboter, que dites-vous de (re)lancer cette tendance ?

Artist unknown

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24 mars 2020 2 24 /03 /mars /2020 09:36

Depuis plusieurs jours, on lit ça et là qu’il ne faut pas perdre le rythme, avoir des repères, ne pas se laisser aller et donc continuer de s’habiller… Le pyjama à perpétuité signerait la fin des haricots et la perte de nos qualités d’animaux sociaux.

 

Intéressant d’observer comment se vêtir fait partie on pourrait le dire ainsi des gestes barrière pour éviter les premiers signes de folie. Cette prise de conscience simultanée avec l’arrivée du printemps et donc l’hiver au placard, le chassé-croisé entre pulls à col roulé et chemises en lin froissé engage une réflexion moins anecdotique qu’elle n’y paraît sur le pouvoir  « magique » des habits pour les grands mais aussi les petits. Ne vous êtes-vous pas d’ailleurs surpris à râler d’être « obligé » de vous rendre présentable pour une vidéo-conférence pro ou retrouver des proches pour un apéro par webcam interposée quand vous aviez trouvé un rythme de croisière en combo legging-hoodies, no make-up, no bra (en anglais c’est plus sympa) ?

 

On voit que pour démarrer la journée, garder un semblant d’humanité, on quitte jogging et autre tee-shirt informes, histoire de montrer l’exemple à la jeune génération pour qui être endimanché n’était jusqu’hier rien d’autre que garder ses vêtements de nuit. 
Je me suis entendue dire : « On est lundi, on s’habille ».

 

En effet, après une semaine de Friday Wear, comprenez « vendredi tout est permis, depuis lundi, mardi, mercredi et aussi jeudi », on se dit qu’en ce deuxième lundi à l’ombre, il est temps de s’amuser et puisque tout est à réinventer, commençons par s’imaginer d’autres vies en ressortant tous nos habits.

Dans un élan qui va de Marie Kondo en mode « grand ménage »  à Sophie Fontanel, Observatrice du dressing personnel, l’idée est simple et a un double intérêt : ranger et créer, se parer pour se marrer. Activité accessible dès l’âge de deux ans, seul.e ou à plusieurs. Avec ou sans miroir. Au choix. Effets secondaires désirés.

 

Dès lors, la routine devient un vieux souvenir.

 

Fini le look normcore pour gagner du temps de cerveau disponible et éviter de flinguer ses beaux vêtements pendant l’activité peinture de la matinée à orchestrer, entre deux mails à envoyer. On sort donc son jeans blanc avec assurance et par amour du risque mais aussi de l’art, on mise sur l’avenir et prie pour éviter un accident du futur Pollock qui n’aurait aucune pitié à baptiser l’indomptable pantalon jusqu’alors immaculé, et ne plus rien avoir à regretter.

 

Fini l’ennui d’un jour sans fin, chaque lendemain est une surprise à venir pour vous-même et votre entourage. Plutôt qu’une croix sur le calendrier, privilégiez « un style, une journée ». Sachez étonner en mixant couleurs, bijoux, matières et autres froufrous avec un seul mot d’ordre : « la mode c’est vous, c’est tout ». N’ayez pas peur de choquer pour stimuler, on s’en fout, Anna Wintour a passé son tour. Lancez des défis, réveillez les âmes joueuses et frondeuses. Vous verrez, les petits seront vos amis. Et plutôt que de faire un énième quatre-quarts, jouer à « déguiser c’est gagner », l’occasion de faire du tri, d’inventer des horizons de rire, d’assumer son côté Queer.

 

Finie la parisienne qui est en vous (même si vous êtes une fille de l’est – Big up Patricia Kaas). Vive la faute de goût – qui plus est si elle ne sort pas de chez vous. Osez ce que vous ne vous êtes jamais autorisé. L’overdressed n’est plus de ce monde. Et cet entraînement n’en sera que plus bénéfique lorsque ce sera votre tour hebdomadaire de sortir pour acheter du lait UHT et des petits Yoplait. Le confinement n’interdisant pas en effet une certaine élégance.

 

Finis les vêtements à usage normé. Coupez, cousez, transformez des robes trop longues, sauvez des pantalons à repriser, inventez des foulards à enfiler, des chemises-tabliers, des colliers lacets. Avec pour unique règle : toute création ne doit pas empêcher de danser.

 

Alors si cela semble désuet, un brin futile, un détail pour vous dans ce scenario fou que nous traversons, pour moi ça veut dire beaucoup. L’habit ne fait pas le moine, en effet. Pourtant, reclus dans nos couvents improvisés, la façon dont on s’habille en dit long sur nos états d’âme. Nos corps qui se meuvent au ralenti autant que les vêtements qui les enveloppent parlent pour nous. Qui n’a pas eu un sursaut en sortant de sa douche, prêt à remettre son linge sale dans un geste mécanique comme Guillaume Depardieu dans Les Apprentis ? Qui n’a pas failli devant l’insistance des fauves en cage pour faire une cabane géante dans le salon (territoire jusqu’alors non colonisé), à grand renfort de Tancarville et de rideaux et ainsi, disparaître sous le tapis comme Les Évadés ? 

 

Jurez-moi que cette situation n’a rien changé dans votre relation au placard et je vous laisse libre, pour aller réviser vos classiques et vous abonner à l’Étiquette (placement de produits). 

 

Ce grand déballage pour s’aérer et retrouver une certaine innocence.

Ce grand ménage pour casser les codes, se déguiser pour s’essayer à d’autres vies.

Une nouvelle saison comme on dit pour réfléchir à ces costumes que l’on porte, qui nous usent, faire sa mue, être bien dans sa peau, continuer à s’exprimer quand il nous manque les mots.

 

Dans sa chambre à elle, comment Virginia s’habillait-elle ? Paraît qu’elle raffolait des bals costumés. Dans notre chambre à nous, on apprivoise un nouveau nous. On pousse les murs, on fait de la place. On se regarde en face. Dans cette chambre, il y a de la place pour une nouvelle aventure faite de tentures, de breloques, de fil à coudre, de coton à colorier, à découper, de laine à tricoter, de créatures à inventer. Dans cette chambre, il y a un avenir, un studio à inventer, où jouer, où se déguiser, où se découvrir, où explorer, où grandir.

 

To be continued.

Crédit Photo/Montage Thomas Lélu

Crédit Photo/Montage Thomas Lélu

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20 mars 2020 5 20 /03 /mars /2020 15:40

Petite, j’avais une amie prodigieuse.
Elle vivait avec ses parents et ses frère et sœur aînés dans une maison avec un jardin merveilleux.

 

Chez elle, on faisait des salades d’endives dans lesquelles on mélangeait des morceaux de pomme et d’emmental.

 

Chez elle, on soufflait - on nous laisser y croire - les commentaires qui accompagnaient les notes dans les copies de mathématique que son père professeur corriger sur un coin de table de la cuisine, pendant qu’on goûtait.

 

Chez elle, on écoutait, derrière le mur de sa chambre, sa sœur s’exercer à la flûte traversière ou son frère dans le garage jouer de la batterie.

 

Chez elle, on s’amusait à dévaliser les armoires et à se transformer en énormes créatures, en superposant manteaux et vestes de toute la famille pour s’affronter dans des combats de laine et de velours, de coton et de plumes. Sous les doudounes et écharpes, on étouffait de rire. Sur le lit parental transformé en ring, on s’entrechoquait sans heurt. On transgressait sagement les codes de bonne conduite, on envahissait les espaces réservés, on s’appropriait les vestiaires qui n’étaient pas les nôtres.

Quand nous étions découvertes, les joues en feu, les cheveux électriques, le cœur emballé, aucune inquiétude d’être grondée ne me traversait. J’avais tout donné, je ne ressentais aucun remord d’avoir froissé quelque ordre. On rangeait sagement, le temps de récupérer notre souffle et nos esprits.


Ce jeu si anodin, puérile, représentait pour moi tant de mondes à explorer. Emmitouflée par des couches de vêtements, je n’avais rien à craindre des chocs, des corps, de l’espace autour de moi. C’était aussi comme déguisée et donc protégée, une autre façon de dialoguer plus libre, plus spontanée et instinctive mais aussi pudique avec cette amie unique car sans qu’un mot ne soit prononcé.

 

Chez elle, tout me plaisait. J’étais aussi petite qu’elle était grande. J’étais aussi brune qu’elle était blonde. Mais j’avais le sentiment que nous formions les deux faces d’une même pièce.

 

Parfois, on nous offrait les mêmes vêtements. Un chemisier vert sapin en velours côtelé immortalisé sur papier glacé. J’étais si heureuse de lui ressembler plus encore croyais-je. Notre apparence jumelle ne faisait qu’affirmer aux yeux du monde notre lien indéfectible.

 

Cela pouvait paraître ridicule. Je n’en avais que faire. Chaque preuve était la bienvenue pour que cela dure.

 

Trente ans plus tard, à l’heure du grand ménage de printemps, au temps du confinement, où l’on cherche à amuser les enfants et les épuiser (accessoirement), je vide les placards à la recherche de tout ce qui pourrait permettre de retrouver le chemin du ring.

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19 mars 2020 4 19 /03 /mars /2020 13:13

« Télé-travailler : mille et un conseils pour être performant chez soi, pendant le confinement ».
S’organiser un emploi du temps aussi serré qu’à l’accoutumé avec « conf call » en cascade, s’habiller en conséquence (le pyjama quand on en porte, est l’ennemi du bien), aménager un espace bureau pour créer de nouveaux repères, s’attaquer aux gros dossiers, une opportunité. Il en va de notre "survie".

Tout en ajoutant une nouvelle corde à notre arc, l’instruction des plus jeunes qu’il faut continuer à stimuler en évitant les écrans à tout prix et les cris - pédagogie positive oblige. Solliciter les enfants pour qu’ils ne perdent pas une miette des jours d’école sacrifiés, irriguer leurs cerveaux d’activités labellisées et les préparer à la rentrée - une éternité, qu'ils savent lire et écrire, ça va de soi.

Sans oublier le coaching des aîné.e.s par tous les moyens de communication mis à notre disposition et accessibles aux générations qui ont connu la guerre, elles.

Fracture numérique à gérer pour combler le fossé générationnel et éviter la fosse commune.

 

 

Résultat, depuis quelques jours, la charge mentale a doublé. Certes, pour celles et ceux vivant en couple, espérons une équitable répartition, un rééquilibrage, une prise de conscience, un lissage, un rattrapage. On rêve. Mais on doit surtout gérer une nouvelle injonction pour les plus chanceux d’entre nous, j’en conviens : celle d’en profiter, de transformer cette épreuve en aubaine. 

 

De nous cultiver, de nous réinventer, de provoquer nos chances, d’achever les TO DO idéalisées et de faire mentir la fatalité. Start up Nation, je vous dis.

 

Ni remord ni regret, challenge accepté.

OK.

OK.

O…K…O…

KO.

Langage binaire pour besoins primaires.

 

Normal de n’avoir envie de rien ?

Avouer ne pas vouloir se lever. 

Et de ne pas savoir retourner cette situation à son avantage.

 

Au contraire des autorisations à sortir, pourrions-nous nous autoriser à la fainéantise ?

Faire néant. 

Battre en retrait. 

Ne plus rien attendre.

Puiser dans les ressources sans convoquer le monde extérieur.

Repli chez soi. En soi.

 

Il faudrait gérer notre foyer désormais, si ce n’est déjà fait, comme nos vies professionnelles. Avec indices d’efficacité. Planifier nos activités les plus anodines pour remplir le vide et promouvoir impudiquement nos réussites banales et répétées.

 

Et si nous abandonnions une certaine ambition ?

Et si nous travaillons à la plus belle des évasions ?

Et si nous ouvrions l’horizon, rien qu’en restant à la maison ?

 

Entre culpabilité de ne pas contribuer à l’effort de guerre, faute d’être infirmière et d’être plutôt vernie par la vie, je cherche des solutions, dans les livres et les chansons pour éviter l’aliénation et dessiner un nouvel avenir, où l’on respire à l’air libre. 

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25 février 2020 2 25 /02 /février /2020 10:50

Nos corps allongés sont de glace.

Sur l’oreiller, nos morts ont pris la place.

Tendus vers une nuit sans fin, nous vivons 

Avec pour seul rêve celui de dormir et d’avoir enfin un destin.

 

D’hier, on se serait bien passé.

Flippé par demain.

L’impression de connaître déjà la fin.

Et d’être passé à côté.

 

Attendre le printemps comme une seconde chance.

Chercher la lumière, compter les heures.

Découvrir la peau pour brûler d’envie,

En enfer ou au paradis, 

Nous finirons en poussière ou sous la terre.

 

De cette leçon à la con, nous ne retenons rien de bon.

De peur de souffrir encore, nous restons planqués sans raison.

 

Et nos morts de rire.

Et nos morts de nous rappeler à dessein, 

L’indécence de ne pas participer au festin.

E. Munch, Vers la forêt - actuellement au Musée Zadkine pour l'exposition Le rêveur de la forêt

E. Munch, Vers la forêt - actuellement au Musée Zadkine pour l'exposition Le rêveur de la forêt

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17 octobre 2019 4 17 /10 /octobre /2019 23:22

À deux pas du cinéma.
Le ciel bas, après une séance à rebattre les cartes, sur un divan de mon petit monde.

Je sors avec l’ennui de rentrer chez moi.

Mes mains dans les poches, j'y trouve le marron ramassé lors d’une promenade dominicale.

Réflexe depuis l’enfance. Activité de saison.

 

Sa main froide attrape la mienne. 

 

Le temps est à pleurer.

Et mon imperméable ne sut arrêter les larmes.

 

Je la serre fort.

Pour la retenir.

Lui dire encore et encore de ne pas me laisser.

Ce n’était pas assez.

Vieillir pour finir ne l’amusait guère.

 

 

J’ai cinq ans dans la forêt. 

Je marche à ses côtés.

Le vent dans les feuilles.

Les branches qui craquent quand nous sortons du sentier.

Elle caresse les arbres.

Évoque leur énergie.

S’agenouille et plonge les mains dans la terre.

Telle était sa prière.

 

Ainsi, elle sema en moi son mystère.

Des choses simples.

 

 

J’ai douze ans dans la cuisine.

Je révise mes déclinaisons latines et massacre à la flûte la valse numéro deux de Chostakovitch.

Ritournelle du mercredi.

Elle, debout devant le feu, surveille le dîner.

Nos plus belles années qu’elle dira à jamais regretter.

 

 

Il y a quelques mois.

Au bord du canal.

Je l’appelle. Elle s’ennuie.

 

Nous parlons de champignons.

De leur goût, lorsqu’ils sont cuisinés frais.

Je lui promets de lui en apporter à l’occasion.

 

 

Il y a quelques semaines.

Au bord du canal.

Je l’appelle. Elle se meure.

 

La journée a été longue, chargée.

Je ne peux la supporter. 

Elle attend un médecin. Je lui dis que ce n’est probablement rien.

 

Qu’elle se repose.

Je lui promets de la rappeler.

En vain.

 

Demain matin. 

Au bord du canal.

Je l’appelle. Il décroche.

Elle est à l’hôpital.

 

Je n’y crois pas.

Mais je sais déjà.

 

 

Quarante-huit heures plus tard, je trouvai l’ombre d’un cerisier pour l’enterrer. 

De l’aube clair jusqu’à la fin du jour, Je consolai son doux, son tendre, son merveilleux amour et sa fille, maman.

 

Je caressai sa joue creuse et ses lèvres gercées et glissai les dessins de nos enfants dans ses mains fermées.

 

 

J’ai cinq ans et je suis en vacances chez mes grands-parents. 
Elle m'a régalé de son gâteau au chocolat

Je l’entends s’afférer dans la pièce d’à côté. 

Dans le couloir, elle se plaint d’avoir froid, on joue aux cartes sur la table en marbre et on le rejoint fermer les volets.


Je les embrasse avant d’aller me coucher.

 

 

David Hockney

David Hockney

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28 mai 2019 2 28 /05 /mai /2019 17:32

L’amie me réveilla avec une voix si douce que je compris avant même d’ouvrir les yeux.

Que dans ces murs désormais, tu étais seul, son corps décharné à tes côtés et tatoué à jamais
de cette nuit qui ne finira jamais de te hanter.

 

Que dans tes bras, enveloppée de ton amour, elle s’échappait du tragique de situation.

Que ce vide dans un dernier souffle serait un poids à jamais dans ta poitrine.

Qu’il faudrait composer avec son absence et que tout la ramènerait à toi.

 

Ce matin,

Ta voix était sourde. 

Mes mots étaient vains.

 

Prévenir d’autres que moi pour t’apaiser, pour ne pas te brusquer.

Un cordon affinitaire et imaginer soulager, partager ta peine et te protéger.

 

Dire la vérité à Orphée qui déjà la connaissait.

Accueillir ses larmes, son refus de l’inéluctable.

Lewis Ofman pour exorciser le mal.

Les Aristochats en diversion pour semer le démon.

 

Les sauver de nos naufrages.

Les protéger de nos regrets.

Les absoudre de nos héritages.

 

Elle n’a pas dit au revoir...

 

Sans Gen.

Il faudra retrouver sa trace et nos envies.

Il faudra vivre sans elle et pour nous aussi.

Il faudra du temps et des océans, 

des nuits étoilées et des chats noir et blanc.

Fiete Stolte, Smoke (After Still Life with Candle #3)

Fiete Stolte, Smoke (After Still Life with Candle #3)

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23 mai 2019 4 23 /05 /mai /2019 09:43

Il y a des années. La première fois.

Il fallait voir. On regardait.

A la suite. On consommait.

Sans tout comprendre, on s’attachait. 

Peggy en tête de gondole, on s’identifiait.

 

On gardait le souvenir d’une leçon de style. Et des histoires à l’eau de rose.

On se jurait qu’on ne tomberait jamais pour Don, aka Dick. Que rien ne l’excusait.

Et on tirait quelques leçons pour le métier quand on en était.

 

Un soir de désert cinématographique, à la fin de l’été, on n’avait pas d’idée.

Plateau télé. Abonnement à volonté. Suggestion ciblée.

Aucun danger. Besoin d’être rassasiée. On l’avait déjà fait.

Recommencer à zéro.

Sans obligation d’achat.

 

Juste un, juste pour ce soir.

Projo perso. Comme pour revenir au niveau. N’avoir aucun regret.

 

J’avais oublié.

Tout y est. Frappe chirurgicale. En concentré. Rien à jeter.

Maîtrisé. Juste et validé. 

 

A l’exception peut-être des réunions alcoolisées et des cigarettes consumées.

 

Elle et lui composent les facettes d’une même pièce. 

Elle est sa rédemption. Il est sa révélation.

 

Des rumeurs de couloirs, des associations, des tromperies, des clients.

Sous toutes les coutures, la vie et la mort dans l’âme. 

It’s a mad world.

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  • : Vodka Lemoni
  • : Pas de justification. Pas de démonstration. Que des tripes avec du style et quelque élégance. Eviter de tomber dans le piège de l'egotrip "Miroir mon beau miroir". Sortir de l'éternelle fatalité "Vous êtes de ceux qui mettent leur orgueil dans ce qu'ils ne font pas" hein Simone. Et pour rendre à Patrick ce qui est à Patrick : "Il vaut mieux vivre avec des remords qu'avec des regrets" So, que la fête commence !
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