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2 mars 2018 5 02 /03 /mars /2018 13:15

Au cœur de la Fashion Week parisienne et à une semaine de la Journée Internationale des droits des Femmes, l’annonce d’une nouvelle ligne Homme par Jacquemus à la fin de son défilé Femme prêt-à-porter Automne-Hiver 2018-2019, faisant suite à la déclinaison du vestiaire Isabel Marant pour les mâles ou encore la très attendue nouvelle ligne Homme de Céline par Hedi Slimane pose question. L’homme serait-il l’avenir de la femme dans cet univers parallèle mais ô combien palpitant qu’est la mode, toujours - encore - à l’avant-garde ?

 

Comment analyser ces annonces en contradiction apparente avec deux phénomènes majeurs qui actuellement structurent les débats de société ? En effet, entre la parole des femmes qui se libère pour dénoncer des comportements archaïques et revendiquer l’égalité de leurs droits et une liberté entière de leurs actes, et la remise en cause du schéma binaire réducteur soi-disant complémentaire « homme-femme » aujourd’hui éculé et obsolète au vu des transformations profondes de nos identités, l’enjeu ne serait-il pas un dépassement (et non une annihilation) des codes genrés davantage qu’une affirmation de deux vestiaires distincts ?

 

Certains ont déjà pris la tangente et proposent des shows « CO-ED » (mixtes) tels que Burberry, Vivienne Westwood, Kenzo ou encore Balenciaga. Le label Vêtements d’ailleurs depuis ses débuts propose un dressing « no gender ». Au-delà des pièces présentées, la confusion des genres s’incarne de plus en plus chez les mannequins. Comment ne pas mentionner à ce titre l’initiative de Playboy d’avoir choisi une beauté transgenre, pour sa couverture de novembre dernier.

 

Qu’implique l’élaboration d’un vestiaire homme qui plus est pour une maison comme Jacquemus ? Ses mannequins seront-il aussi sensuels que le sont ses créatures féminines ? Aurons-nous autant de plaisir à apprécier la douceur d’une épaule masculine qui se dévoile sous un tissu évanescent, le coup de pied d’un bellâtre ou encore la cambrure de ses reins ? En clair, le corps des hommes sera-t-il autant un objet de fantasme ? Ou jouera-t-il avec une androgynéité nouvelle ? Nous sommes impatients de découvrir ce que Simon Porte Jacquemus, le créateur, nous réserve et s’il aura idée d’aller piocher dans le dressing de ses amies, mère, sœurs pour inventer l’homme à son image.

 

Car si le corps des femmes a trouvé quelque réconfort et émancipation chez des créateurs tels que Chanel, Yves-Saint-Laurent pour ne citer qu’eux, n’ayant aucun tabou à emprunter au vestiaire des hommes, quelle pièce pourrait à ce point rebattre les cartes du jeu dans un mouvement inverse ? Le paradoxe étant que les basiques aux attributs féminins ont été des symboles d’inégalité pendant des siècles.  Illustration par un exercice pratique : « comment répondre à un garçon de quatre ans qui demande pourquoi lui ne porte jamais de jupe ou de robe contrairement à ses amies à l’école ? ». (N’hésitez pas à partager vos réponses).

 

Les clichés vestimentaires ont la vie dure, au-delà de l’incontournable bleu pour les garçons/rose pour les filles. Et restent très codifiés socialement. Pour preuve, la dernière initiative de La Redoute qui a l’occasion de la Journée de la Femme digitale en avril prochain, lance une ligne de chemises blanches personnalisables pour « donner envie aux femmes d’oser, d’innover et d’entreprendre et installer cette ligne de chemises blanches comme un symbole de l’entrepreneuriat et de l’intrapreneuriat au féminin » (dixit le communiqué de presse). Est-ce futé que de jouer avec les codes du patriarcat (cf. les cols blancs versus vers les cols bleus) afin d’appeler à l’émancipation des femmes ? Le débat est ouvert.

 

Autre interrogation légitime même si relevant d’un mauvais esprit à propos, le prix des pièces pour hommes sera-t-il 24% plus cher que celui des pièces pour femmes ? Si l’argument n’est pas vendeur (encore que), il n’en ferait pas moins un excellent coup de communication.

 

Outre la curiosité suscitée par ces révélations et les interrogations d’ordre esthétique qu’elles soulèvent (L’homme Céline sera-t-il aussi cérébral que son alter-ego féminin ? Jack, le jean d’Isabel Marant Homme, deviendra-t-il un objet de désir et remettra-t-il le boyfriend sur le devant de la scène ?), espérons que cette dynamique paritaire – est plus encore égalitaire – dans les vestiaires mette à jour la seule vraie règle du genre qui soit, à savoir, qu’il y a autant de différences entre un homme et une femme, qu’il y en a entre deux femmes ou deux hommes, ou deux individualités qu’importe la façon dont elles se définissent l’une et l’autre.

 

La guerre de tous les sexes pourrait-elle finir au placard ?

Coming (out) soon.

Hedi Slimane ; collection Homme Isabel Marant ; Simon Porte Jacquemus

Hedi Slimane ; collection Homme Isabel Marant ; Simon Porte Jacquemus

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  • : Vodka Lemoni
  • : Pas de justification. Pas de démonstration. Que des tripes avec du style et quelque élégance. Eviter de tomber dans le piège de l'egotrip "Miroir mon beau miroir". Sortir de l'éternelle fatalité "Vous êtes de ceux qui mettent leur orgueil dans ce qu'ils ne font pas" hein Simone. Et pour rendre à Patrick ce qui est à Patrick : "Il vaut mieux vivre avec des remords qu'avec des regrets" So, que la fête commence !
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